Nexus 2 by Miller Henri

Nexus 2 by Miller Henri

Auteur:Miller, Henri
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2004-01-01T05:00:00+00:00


Avant de mettre le cap sur la Hongrie, nous prîmes un dernier repas avec la famille de Mona dans un restaurant de notre choix. Nous avions quelques inquiétudes à propos de la langue, bien entendu. Le colonel s’efforça de nous convaincre qu’avec l’allemand et l’anglais nous ne rencontrerions aucun problème. Malgré tout, je le persuadai de noter pour nous sur un papier quelques phrases en hongrois. Des choses simples, du genre : « Où se trouve la poste la plus proche ? », « Combien ça coûte ? », « Pouvez-vous me donner l’heure, s’il vous plaît ? », « Où se trouvent les toilettes pour hommes ? », « Je vous demande pardon ? », « Pouvez-vous me donner du feu, s’il vous plaît ? », « Puis-je voir le menu ? », et ainsi de suite. Il s’appliqua à bien calligraphier ces phrases, plaça les accents et tout, avant de les prononcer encore et encore ; cet exercice s’avéra totalement dénué de sens, car l’instant d’après j’avais oublié comment dire la plus simple des formules. Quelle langue ! Quel charabia incompréhensible ! Par exemple : « Bocsanatot Kerek. » Qui, sinon un Hongrois lui-même, pouvait s’imaginer que cela voulait dire : « Excusez-moi, s’il vous plaît. » Ou bien cela, pour consulter le menu : « Kernem Az Etlapot ! » Et pour « Combien ça coûte ? », « Mennyibe Kerulez ? » Seul un génie pouvait maîtriser un tel outil. Avec la vessie sur le point d’éclater, et le regard halluciné, je devais bientôt me rendre compte dans quel pétrin on pouvait se retrouver lorsqu’il s’agissait de demander le chemin des toilettes. Je mentionne cet exemple parce qu’il s’agit là d’une des phrases (absolument nécessaires) que j’avais désespérément tenté de mémoriser. Lorsque la nécessité se présenta, les mots m’étaient complètement sortis de l’esprit. Dansant sur un pied, puis sur l’autre, j’extirpai le carnet de ma poche, me répétai la phrase une bonne demi-douzaine de fois avant de chercher quelqu’un à qui adresser ma demande. La chance voulut que l’homme vers qui je me tournai fût ivre mort. De plus, il n’était pas hongrois mais polonais, et une vraie brute avec ça. « Hol Van A Ferfi Closet ? » répétai-je à trois reprises. Il secoua la tête, posa une question en polonais, à laquelle je secouai la tête à mon tour, puis il me tourna le dos. Je le relançai, le tirant par la manche, et tout en lui jetant un regard implorant, je pris mes testicules dans une main, tout en faisant le geste de pisser de l’autre. Une vague lueur sembla briller sur son visage par ailleurs bovin. « Pissy », lança-t-il. Ou du moins c’est ce qu’il me sembla entendre. « Je vous en prie, articulai-je. Pissy ! » Il m’agrippa le bras et tituba jusqu’à l’endroit en question. Comme je poussais la porte, je m’aperçus qu’elle portait l’inscription très claire : « Toilettes hommes ». « Pissy ! hurlait-il. Bon pissy !



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.